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L’effondrement de la biodiversité

Bonjour à toutes et à tous,

Vous avez sans doute appris, à la télé, il y a peu, qu’environ 1 million d’espèces étaient menacées d’extinction sur la planète.

Eh bien cette information ne sort pas de nulle part.

En effet, l’IPBES, la plateforme scientifique mondiale sur la biodiversité, a publié le 6 mai un rapport historique et très alarmant concernant l’état de la biodiversité dans le monde.

Il aura fallu 3 ans de travail, 15 000 références scientifiques et gouvernementales épluchées et synthétisées par 355 experts de 50 pays, pour produire le rapport 2019 de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES).
A ce jour, il s’agit de l’analyse scientifique la plus aboutie sur l’état du vivant sur notre planète.

Il est à souligner que pour la première fois, à cette échelle, ce rapport s’appuie aussi sur les savoirs autochtones et locaux, et aborde en particulier les questions concernant les peuples autochtones et les communautés locales : on ne parle donc pas seulement d’écosystèmes mais également de socio-écosystèmes.

Mais peut être ne savez vous pas exactement ce qu’on entend par biodiversité il est donc important de définir précisément cette notion :


Que nous dit le rapport 2019 ?

Le rapport nous dit que :
 « La nature décline globalement à un rythme sans précédent dans l’histoire humaine – et le taux d’extinction des espèces s’accélère, provoquant dès à présent des effets graves sur les populations humaines du monde entier »,

Ce document nous montre :
1. que ce sont d’abord les Cycas (Cycads en anglais) qui sont menacés par les activités humaines ainsi que le réchauffement climatique en cours. Ces plantes existent en milieu tropical et sub-tropical ce qui nous montre à quel point cette zone est déjà de plein pied dans des transformations environnementales importantes.
2. Que les plantes à fleurs (dicotylédones) et les conifères sont menacés à un niveau moins important (30% des espèces sont en danger). Cependant, il faut se représenter les milieux sauvages que cela représente et donc les écosystèmes qui sont en danger.
3. Pour nous ce sont des groupes plus marquant qui se situent avec 20% de leurs espèces en danger comme les amphibiens (grenouilles, salamandres, ...), les mammifères (Lion, Guépard, Rhinocéros, Marmotte, Loup, Ours, Homme) ou encore les oiseaux (Mouette, Autruche, Kiwi, Corneille, ...).

Exemples de quelques espèces qui courent un risque important de disparaître :

Le doc B est un graphique représentant le pourcentage cumulé d’espèces (en fonction des groupes) en voie d’extinction en fonction du temps (de 1500 à 2018).
— > On observe clairement une inflexion dès le début du 19ème siècle (1ère révolution industrielle) puis une accélération de la disparition des espèces (notamment des amphibiens) dû à l’assèchement des zones humides, l’urbanisation et l’utilisation accrue d’énergie pour transformer notre environnement.

Le doc C est un graphique représentant l’indice de survie des espèces (toujours en fonction des différents groupes) de la liste rouge de l’UICN en fonction du temps (de 1980 à 2015)
— > On constate que les coraux sont ceux qui ont vu leur situation se dégrader le plus rapidement en moins de 20 ans. Cela s’explique par l’élévation de la température de l’eau, la pollution et le chalutage qui détruit les coraux profonds.

Depuis le début du XXe siècle, le nombre d’individus des 8 millions d’espèces estimées sur Terre (dont 5,5 millions d’insectes) a diminué d’au moins 20 % en moyenne. Plus de 40 % des espèces d’amphibiens, près de 33 % des récifs coralliens et plus d’un tiers de tous les mammifères marins sont menacés.
La situation est moins claire pour les espèces d’insectes, mais les données disponibles conduisent à une estimation provisoire de 10 % d’espèces menacées. Fin 2017, une étude menée sur vingt-sept ans en Allemagne a dénombré la perte de 75 % des insectes volants dans le pays - et cela seulement dans les zones naturelles protégées.
Au moins 680 espèces de vertébrés ont disparu depuis le 16e siècle et plus de 9 % de toutes les races domestiquées de mammifères utilisées pour l’alimentation et l’agriculture avaient disparu en 2016, et 1 000 races de plus sont menacées.

 « La santé des écosystèmes dont nous dépendons, ainsi que toutes les autres espèces, se dégrade plus vite que jamais. Nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes de nos économies, nos moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie dans le monde entier » a déclaré le président de l’IPBES, Sir Robert Watson.

Ce document nous montre quels sont les principaux éléments conduisant à la dégradation des écosystèmes.
Pour comprendre ce document il faut d’abord se représenter quels sont les entités qui vont influencer indirectement les actions sur l’environnement.
1. Il y a d’abord la démographie et les activités socio-culturels des populations (le nombre d’humains, leur comportement, leurs us et coutumes)
2. L’économie et la technologie qui vont influencer le niveau de développement d’un pays et l’exploitation de son environnement terrestre et marin.
3. Les institutions et gouvernements en place en ce qui concerne l’information, la régulation, les grands projets, la législation et le contrôle de l’ensemble (s’il existe).
4. Les conflits (guerres, guerres civiles, ...) et les épidémies qui peuvent tuer les populations, le bétail ou encore des animaux sauvages ou d’élevage.
Lorsqu’on combine l’ensemble de ces facteurs d’influence on arrive à un résultat qui s’applique aussi bien en mer que sur terre ainsi que dans les rivières et les fleuves.
— > 50 % de la destruction des écosystèmes est due à la modification de l’environnement et à son exploitation directe.
— > 10 à 20 % des impacts sur les écosystèmes peuvent être ensuite attribués au changement climatique.
— > 10 à 20 % des impacts sur les écosystèmes peuvent être également attribués à la pollution.
— > 10% des impacts sur les écosystèmes sont attribués à des espèces invasives (c’est à dire à des espèces qui ont été déplacées volontairement ou involontairement dans un écosystème autre que le leur).

En fait, les trois quarts de l’environnement terrestre et environ les deux tiers du milieu marin ont été significativement altérés par l’action humaine. En moyenne, ces tendances ont été moins graves ou évitées dans les zones qui appartiennent à ou sont gérées par des peuples autochtones et des communautés locales. A titre exemple, l’humanité a détruit 85 % des zones humides par rapport à l’ère préindustrielle.
Les causes du déclin de la biodiversité sont connues depuis des décennies et on peut les citer : déforestation, industries extractives, destruction des habitats, industrialisation de l’agriculture, utilisation massive de pesticides, dégradation des sols, surpêche, surpopulation humaine, changement climatique, déchets plastiques, étalement urbain, espèces envahissantes apportées par nos échanges (+ 70 % : depuis 1970), agrocarburants, surconsommation et soutien à tout prix de la croissance économique : jamais l’impact de l’Homme sur la planète n’a été si fort et généralisé.
Les principaux facteurs indirects comprennent l’augmentation de la population et de la consommation par habitant ; l’innovation technologique, dont les dommages causés à la nature ont diminué dans certains cas tandis qu’ils ont augmenté dans d’autres ; et, de manière critique, les questions de gouvernance et de responsabilité
.

 « ce n’est pas trop tard pour agir, mais seulement si nous commençons à le faire maintenant à tous les niveaux, du local au mondial », a-t-il ajouté « Grâce au « changement transformateur », la nature peut encore être conservée, restaurée et utilisée de manière durable – ce qui est également essentiel pour répondre à la plupart des autres objectifs mondiaux. Par « changement transformateur », on entend un changement fondamental à l’échelle d’un système, qui prend en considération les facteurs technologiques, économiques et sociaux. Cela signifie qu’il faudra revoir notre vision du monde et la façon dont nous interagissons avec, quelles sont les valeurs auxquelles nous sommes attachées et quelles sont les valeurs que nous allons devoir mettre en avant pour pouvoir nous en sortir.

Ce document nous montre où se trouvent les leviers pour changer nos comportements et diminuer notre empreinte sur les environnement et notre action de prédation sur les espèces.
 Changer notre vision de ce qu’est une vie agréable
 Réduire notre consommation personnelle et notre production de déchets
 Libérer les forces d’action
 Réduire les inégalités sociales
 Pratiquer la justice et l’inclusion des individus dans la conservation des milieux
 Internaliser les coûts écologiques
 Assurer l’innovation technologique et les investissements pour ces innovations.
 Promouvoir l’éducation, la production de connaissance et le partage.

Vous comprenez que les scientifiques incitent à un changement profond des mentalités et à une modification radicale de notre modèle de développement. Il faut changer de voie, celle que nous empruntons est mortelle !

Mais pourquoi devrait-on se soucier de la biodiversité ?

Les scientifiques de l’Ipbes soulignent qu’il ne s’agit pas seulement de sauver des espèces innocentes. La nature rend d’énormes services à nos sociétés : du bois qui permet à plus de 2 milliards de personnes de se chauffer et se nourrir, aux remèdes naturels dont dépendent 4 milliards d’être humains, en passant par les processus naturels de purification de l’air, de l’eau et des sols. La planète régule aussi le climat pour qu’il reste viable. Les forêts, sols et océans capturent le dioxyde de carbone émis par les hommes avant qu’il ne participe à l’effet de serre. Le texte insiste : « La majorité des contributions de la nature aux sociétés ne sont que partiellement remplaçables, voire irremplaçables. »

Il faut bien comprendre que nous ne sommes pas en dehors de la biodiversité et des écosystèmes mais que nous appartenons à la biodiversité et que nous sommes partie intégrante des écosystèmes même si nous les avons considérablement modifiés. Si ils venaient à s’effondrer radicalement alors nous serions radicalement en danger de nous éteindre nous aussi ...


Sources :
IPBES Report : https://www.dropbox.com/sh/yd8l2v0u4jqptp3/AAACtf6ctsoUQ9hlPQxLpVsKa?dl=0&preview=20190504+IPBES7+Media+Release+Global+Assessment+Final+Errata2+FRE.pdf
UICN.fr : https://uicn.fr/le-rapport-mondial-de-lipbes-confirme-le-declin-alarmant-de-la-nature/
La liste rouge des animaux menacés en France
La liste rouge des animaux menacés dans le Monde
Libération.fr : https://www.liberation.fr/planete/2019/05/05/biodiversite-la-terre-paye-en-especes_1725157


Pour aller plus loin :
 [Joan Van Baaren] Pourquoi l’Homme a-t-il besoin de la biodiversité ?
 [Gilles Boeuf] Environnement : les causes d’intranquillité
 [Gilles Boeuf] Biodiversité / humanité : quelle évolution ?
 [Daniel Nahon] Sauvons l’agriculture !
 [Jacqueline Goy] Poissons - Méduses, la fin d’un mythe


Scientifiquement vôtre,
M. mOyOn