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Des ondes gravitationnelles ? L’astrophysique vers de nouveaux horizons ....

Bonjour,


Le 14 septembre, 2015, l’interféromètre LIGO a détecté pour la première fois de façon directe le passage d’ondes gravitationnelles. Ces ondulations dans le tissu de l’espace-temps avaient été émises il y a 1,3 milliards d’années par la fusion violente de deux trous noirs dans l’univers lointain.


  1. Les ondes gravitationnelles, c’est quoi ?
  2. Comment a-t-on pu les détecter ?
  3. Est-ce que c’est intéressant pour le futur ?


Alors c’est quoi et çà vient d’où une onde gravitationnelle ?


1) Il y a 100 ans, un mec pas très connu, Albert Einstein, publiait sa nouvelle théorie de la gravitation : la relativité générale (voir article 55). Il publie quatre articles sur ce sujet, deux en 1915 et deux en 1916.
Cette théorie explique la gravitation par la courbure de l’espace-temps. L’espace-temps est une sorte de tissu en 4D (les 3 dimensions de l’espace et la dimension du temps, comme une cage à poule infinie) qui compose notre univers et c’est la déformation de ce tissu qui est à l’origine de la gravitation.


Cette théorie a été plusieurs fois vérifiée grâce :
 A la déviation de la lumière par les corps massifs (qui courbent les rayons lumineux à leur proximité)
 Un calcul de la trajectoire exacte de Mercure
 L’existence des trous noirs
 ... et d’autres


Il restait cependant une prédiction non vérifiée qui était l’existence d’ondes gravitationnelles : c’est à dire une onde de perturbation (de déformation) de l’espace-temps comme le ferait un caillou, jeté au milieu d’une mare, sur la surface de l’eau.
C’est cette propagation de la déformation de l’espace-temps qui a été observée le 14 septembre, 2015. Une observation qu’Einstein pensait impossible à son époque.


Comment a-t-on détecté cette propagation de la déformation ?


2) Cette déformation s’opère en deux temps :
Il y a d’abord une dilatation (un allongement) verticale et une contraction (un raccourcissement) horizontale, suivi, dans un second temps, par une dilatation horizontale et une contraction verticale. Et cette séquence peut se répéter plusieurs fois. Ce sont alors les différences de longueur qui ont été mesurés.

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Pour cela, on utilise un interféromètre : Il s’agit d’une méthode optique qui utilise le laser.
On prend une source qui envoie un rayon laser et ce faisceau laser va être divisé en deux faisceaux dont l’angle qui les sépare fait 90°. Ces deux faisceaux vont parcourir une longue distance, trois kilomètres pour Virgo (expérience européenne) et de quatre kilomètres pour LIGO (l’expérience américaine) dans deux tubes respectifs dans lesquels le vide a été fait et au bout desquels on trouve un miroir pour renvoyer le faisceau lumineux à sa source.
La configuration des installations est telle que les faisceaux se rejoignent à l’intersection des deux tunnels, où les deux ondes laser interfèrent de façon destructive (les maximums de l’onde d’un faisceau se superposent aux minimums de l’autre onde, et la somme donne un signal nul).
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 Si il n’y a pas d’ondes gravitationnelles le capteur placé en aval de ce point reçoit alors un signal nul.
 Si il y a une onde gravitationnelle qui passe alors les deux faisceaux laser ne reviennent pas au même instant et alors apparait un signal.


C’est ce deuxième évènement qui s’est produit le 14 septembre 2015, suite à la fusion de deux corps très massifs dans l’espace, deux trous noirs



Le principe physique du dispositif est simple, mais la mise en œuvre est un réel défi pour les chercheurs et les ingénieurs. En effet, pour une onde gravitationnelle suffisamment intense pour qu’on puisse espérer la détecter, la variation de longueur des bras de l’interféromètre est de l’ordre du milliardième de la taille d’un atome ! Les interféromètres géants sont sensibles à un changement aussi faible, mais les physiciens doivent écarter de nombreuses sources de bruit qui perturbent la mesure (l’agitation thermique des atomes à la surface des miroirs placés aux extrémités des bras de l’interféromètre, les mouvements sismiques de la Terre…).


Quel est l’intérêt de cette découverte pour l’avenir ?


3) Cette annonce est d’abord une confirmation de la théorie de la relativité générale et de l’existence des ondes gravitationnelles. Ensuite, elle confirme le fait que deux trous noirs assez massifs peuvent fusionner, un phénomène qui n’avait jamais été observé. Enfin, l’accord entre le signal enregistré et la théorie de la relativité générale constitue le premier test (réussi) de celle-ci dans des conditions aussi extrêmes (gravitation très intense).


Au delà de ce résultat, c’est désormais une nouvelle fenêtre qui s’ouvre sur l’Univers. En effet, le cosmos pourra désormais être observé autrement que par des méthodes utilisant la lumière, dont les chercheurs exploitaient déjà toutes les longueurs d’onde du spectre (des rayons gamma aux ondes radio).


Les ondes gravitationnelles apportent l’espoir de pouvoir explorer des phénomènes auxquels la lumière ne permet pas d’accéder.


 Par exemple, une étoile massive en fin de vie qui s’effondre sur elle-même produit des ondes gravitationnelles, alors que le cœur de l’étoile est opaque pour la lumière. Les ondes gravitationnelles pourraient dans ce cas fournir des informations précieuses aux astrophysiciens.


 L’Univers primordial a aussi produit des ondes gravitationnelles qui fourniraient des indications sur les conditions régnant dans les premiers instants de l’Univers. (Ces ondes ne sont cependant pas accessibles à Virgo et LIGO, car leurs fréquences sont bien inférieures à la sensibilité de ces interféromètres.)


 Des sources importantes d’ondes gravitationnelles ciblées par Virgo et LIGO sont les systèmes binaires en coalescence, deux étoiles à neutrons ou trous noirs en orbite l’un autour de l’autre. Un tel système émet de grandes quantités d’ondes gravitationnelles qui se traduisent par une perte d’énergie lorsque les deux astres se rapprochent jusqu’à fusionner – la coalescence.


Dans l’événement observé par LIGO, il s’agit d’un système binaire de deux trous noirs de 29 et 36 masses solaires, distant de 1,3 milliard d’années-lumière. Les deux détecteurs ont enregistré le même signal avec seulement 7 millisecondes d’écart, le temps que l’onde se propage d’un détecteur à l’autre. Cette coïncidence ainsi que la forme du signal sont des indices convaincants que LIGO a enregistré une onde gravitationnelle.


Les ondes gravitationnelles émises par les trous noirs constituent un signal très particulier : la fréquence et l’amplitude du signal augmentent à mesure que les astres s’approchent de plus en plus vite en spirale l’un vers l’autre. Les deux astres finissent par fusionner en formant un trou noir dont l’« horizon des événements », sa frontière en quelque sorte, est très déformé. Il se stabilise en une fraction de seconde et devient un trou noir en rotation sur lui-même, de forme plus régulière. C’est cette coalescence qui a produit des ondes gravitationnelles suffisamment intenses pour être détectées.


L’analyse du signal enregistré indique que la masse du trou noir résultant est 62 fois celle du Soleil. Ainsi, pas moins de 3 masses solaires ont été converties (E = mc2, rappelons-le, voir article 53) en ondes gravitationnelles en moins d’une seconde ! Et juste avant la fusion des deux astres, ces derniers tournaient l’un autour de l’autre à une cadence de 75 tours par seconde, à une vitesse voisine de la moitié de celle de la lumière...


Conclusion :

Cette détection des ondes gravitationnelles nous apporte la confirmation que la théorie de la relativité générale est solide et fonctionne à merveille.
Elle nous offre la preuve que les trous noirs peuvent fusionner ensemble en convertissant une partie de l’énergie dont ils sont constitués en ondes gravitationnelles.
Et enfin, ce résultat montre une belle réussite d’un point de vue technique et l’efficacité de la mise en commun des forces des collaboration LIGO et Virgo qui partagent les outils d’analyse des données.
La future mise en service du détecteur amélioré de Virgo s’annonce prometteuse. En combinant les mesures des deux installations de LIGO et de celle de Virgo, les chercheurs pourront, par triangulation, déterminer la position de la source des ondes gravitationnelles dans le ciel.
On peut donc affirmer aujourd’hui que l’ère de l’astronomie des ondes gravitationnelles vient de naître !

Scientifiquement vôtre
M. mOyOn

Voir en ligne : Source - Ondes gravitationnelles : une détection directe historique